V comme…Vartaupe
Dans les campagnes des vallées du Loir, de Touraine ou de Berry, les jeunes enfants souffraient souvent de maladies de la peau : impétigo, eczéma, teigne de lait…A l’une d’elles on avait donné le nom de « vartaupe » ou « vertaupe ». Ce mal était caractérisé par une enflure et une tâche noire dans laquelle on croyait reconnaître la forme des pattes d’une taupe, dans la partie malade la plus marge, et le nez de l’animal à chaque extrémité. De plus, cette appellation découlait de la ressemblance qui existe entre le bourbillon qu’on extirpe (en médecine, un bourbillon est amas de pus et de tissu nécrosé au centre d’un furoncle) et un ver qui aurait creusé dans le derme une galerie et qui comme celle d’une taupe dans le sol provoquait comme un soulèvement. C’est de ces deux noms associés « ver ou var » et « taupe » que serait né le mot « vartaupe » ou « vertaupe » qui n’est autre que la douloureuse furonculite.
On pouvait soigner soi-même ce mal. Dans ce cas, il fallait cueillir du lierre qui a poussé sur un puits, le mettre dans un bas de laine et poser le cataplasme sur le mal. On y ajoutait en général une tuile chaude.
Mais bien souvent, dans ces campagnes isolées, on pouvait se livrer à des pratiques étranges en préférant faire appel à une personne ayant le pouvoir spécial de guérir cette maladie.
Il fallait que ce personnage étant enfant, ait étouffé sept taupes et qu’il ne mange pas de graisse. Ce don de faire disparaître les furoncles et les verrues lui avait été transmis par ses ancêtres. Sa thérapeutique ressemblait sans doute à celle des empiriques et des rebouteux. Beaucoup y croyait et il y eut des guérisons…
Cette personne qui avait le pouvoir était le « Vartaupier ».
Dans la Gazette médicale du Centre, on retrouve le vartaupier.
« J’en viens maintenant à la vartaupe, c’est le mot usité dans mon pays. Dans le Bas-Poitou on dit ver de taupe ou vertaupe.
Les paysans poitevins, dit le Dr Tiffaud(1), appellent ver de taupe ou vertaupe, le furoncle vulgaire.
_Quelle est l’origine de ce mot ? _Nous lisons dans un vieux traité de chirurgie(2) que la taupe est une « tumeur molle et assez large qui vient ordinairement à la teste et au visage, et qui contient un pus blanc, épais et pituiteux.» Dans son dictionnaire de médecine, P.-H. Nysten donne de la taupe cette définition plus explicite : « espèce de loupe irrégulière, sinueuse, formée sous les téguments de la tête qui sont soulevés comme la terre fouillée par une taupe. »
Seul le mot taupe est suffisamment expliqué.
Quant au ver, nous croyons en avoir trouvé la signification dans la présence du bourbillon…
Nous connaissons un jeune homme qui s’est fait toucher un ver de taupe de la jambe. Voici ce qu’il nous a raconté : « La personne qui touche le ver de taupe doit avoir étouffé. pendant qu’elle était au berceau, une taupe renfermée dans un petit sac de toile. Dans quelques endroits on met la tète de la taupe dans la main de l’enfant et on la lui fait serrer
Jusqu’à ce que l’animal soit étouffé. »
On va chez le guérisseur trois matins de suite, et avant le lever du soleil.
La personne qui touche, applique la paume de sa main droite sur le ver de taupe; puis elle récite à voix basse une prière précédée et suivie d’un signe de croix.
Ceci fait, le malade retourne chez lui, mais, chose essentielle, il ne faut pas qu’il y ait de cours d’eau à traverser, car le bénéfice de l’attouchement et de la prière serait perdu.
C’est la femme X…, continue-t-il, qui m’a guéri, mais la femme Y pourrait en faire autant, si elle savait la prière, car elle aussi a étouffé autrefois une taupe. Je souffrais depuis quatre jours, et quelques jours après le dernier attouchement, mon ver de taupe a percé. »
Voici maintenant la prière pour guérir le ver de taupe (3) :
Ver de taupe, ver de taupe, je t’étouffe, comme j’ai étouffé l’autre. Notre Père… Je vous salue Marie… Au nom du Père…
(1) Dr Jean Tiffaud: L’Exercice illégal de la médecine dans le Bas Poitou (Les toucheurs les guérisseurs); Thèse, Paris, 1899.
(2) La chirurgie complète pur demandes et par réponses, par M. Le Clerc, ‘ conseiller médecin ordinaire du Roy. Paris MDCXCV, P. 179.
(3) B. Souché : Croyances, présages et traditions diverses, in Bulletin de la Société de statistique des Deux-Sèvres, t. IV.
Dans Le Folklore de France, de Paul Sébillot, on retrouve approximativement la même chose, à une soupe près.
« En Berry, la personne qui, dans son enfance, a étouffé sept taupes vivantes, avant d’avoir mangé de la soupe de graisse, a la faculté de faire disparaître le ver-taupe en pressant la partie malade en plusieurs sens. »
V comme…Venant
Venant est un berrichon de souche gallo romaine appartenant à un milieu assez modeste. Ses parents avaient décidé de le marier et avaient fait le choix pour lui d’une jeune fille qui lui plaisait. Le temps des fiançailles avait commencé avec l’échange des présents et les attentions affectueuses. La vie de Venant semblait avoir trouvé son orientation et il en était heureux.
Un pèlerinage qu’il fit à Tours au tombeau de Saint Martin bouleversa sa vie. Il y vint au temps où l’abbé Silvinus gouvernait le monastère proche de la basilique. La vue des miracles impressionna beaucoup Venant et le décida à se convertir? Il embrassa la vie monastique dans le rayonnement de ferveur qui émanait du tombeau. Il laissa sa future épouse, reçut la tonsure cléricale, prit l’habit monastique et s’agrégea à la communauté de Silvinus. Grégoire de Tours néglige de fournir les repères chronologiques permettant de dater la naissance et la mort de Saint Venant mais on sait que l’évêque Licinus (508-520) avait été abbé du monastère de Saint-Venant, de même après lui l’évêque Guntharius (Gontran, après 550 et av. 554 ), ce qui prouve à la fois, l’importance du monastère puisque ses abbés sont choisis comme ses évêques, et l’antériorité de Saint Venant par rapport à l’année 508. L’abbé appartient certainement au Vème siècle. Il doit être contemporain des évêques saint Eustache et Saint Perpet. (source : La Touraine insolite)
Challenge AZ 2019