Publié dans Personnalités tourangelles, Petite histoire de la Touraine

Margueron, botaniste

(texte de Martine Courtois et Marc Rideau, UFR des Sciences pharmaceutiques – EA 2106 « Biomolécules et biotechnologies végétales » 31 avenue Monge, 37200 TOURS, France)

Jean-Anthyme Margueron, pharmacien, botaniste et philanthrope est né à Tours le 12 juin 1771. Il est le quatrième garçon et le benjamin d’une fratrie de neuf enfants issue d’une famille de marchands ciriers. Il se marie avec une orléanaise, Jeanne-Claude Lenormand, qui lui donnera un fils unique, CharlesJoseph-Anthyme, mort en 1806 à l’âge de 6 ans. En avril 1793, après la « Levée en masse » décrétée par la Convention nationale, il part combattre la révolte des vendéens. Rapidement blessé à la bataille de Chemillé, il est hospitalisé à l’ancien monastère tourangeau de Marmoutier, transformé en hôpital militaire ambulant. Il y fait la connaissance du pharmacien-chef Jean-Louis Metges qui le persuade de devenir pharmacien. Le 19 octobre 1795, alors qu’il part rejoindre l’armée, il apprend à Saumur son acceptation comme pharmacien militaire de troisième classe à l’hôpital militaire d’instruction des armées au Val de Grâce. Il en profite pour suivre les cours gratuits du Collège de pharmacie de Paris. Ses premières recherches sur les huiles essentielles des Rutacées, comme la bergamote, sont publiées dans les Annales de Chimie (« De l’action du froid sur plusieurs huiles volatiles », 1797, Annales de chimie, 11 pluviôse an V, t. 21, 176- 181.) . Intégré ensuite aux armées de la République, il est promu pharmacien militaire de seconde classe en 1799, et poursuit ses recherches sur les huiles . En 1804, il suit la Grande Armée en tant que pharmacien militaire de première classe, soignant les blessés des grandes victoires de l’Empereur. Epuisé après la bataille particulièrement sanglante de Wagram en 1809, il décide de démissionner malgré les éloges qu’il reçoit de ses supérieurs et la promesse de la Légion d’honneur. Après avoir obtenu son diplôme « civil » de pharmacien à l’école spéciale de pharmacie de Paris le 7 décembre 1810, il revient à Tours où J.L. Metges l’associe à son officine installée au numéro 19 de la rue royale (actuelle rue Nationale).  Margueron, devenu en 1814 seul titulaire, annexe en 1816 à son officine, à l’exemple du pharmacien parisien Jean-Chrysanthe Galés et avec l’accord de la Société Médicale du département d’Indre-et-Loire un établissement de fumigations sulfureuses pour le traitement des maladies de peau (dartres, gales…) et des douleurs rhumatismales. Il acquiert une réputation d’homme bon et généreux aidant les malades indigents. C’est aussi un expert auprès du tribunal de première instance de Tours qui le consulte conjointement avec le médecin-chef de l’hospice général de Tours, Pierre-Fidèle Bretonneau ou avec le naturaliste Félix Dujardin, futur découvreur du cytoplasme. Membre de la Société Médicale de Tours depuis 1811 et de l’Académie de Médecine depuis 1825, Margueron s’intéresse à la potabilité des eaux. Cette préoccupation hygiéniste l’amène en 1826 à expertiser la « fontaine de Jouvence » située au moulin de Touvois sur la commune de Rochecorbon (Indre-etLoire). Il conclut au caractère fantaisiste des vertus miraculeuses attribuées à cette eau vendue en bouteilles à Paris à 1,50F le litre. Margueron cède son officine en 1832. Il a alors 61 ans, et sa retraite sera très active. Il continue ses expertises et participe aux travaux préliminaires de la première Flore d’Indre-et-Loire, rédigée par Félix Dujardin et commanditée par la Société d’Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres du département d’Indre-et-Loire à laquelle il appartient depuis 1824 et dont il préside la section « Sciences » depuis 1830. Encouragé par cette Société, il tente l’acclimatation de plantes exotiques, tel Polygonum tinctorium (Persicaria tinctorium), originaire de Chine dont il parvient à extraire une substance colorante susceptible de remplacer l’indigo. Ces travaux lui valent une médaille d’argent à l’exposition des produits de l’industrie à Tours (1841) et les félicitations royales en 1842. Cependant, les essais de cultures coûtant cher à la ville et au département sont finalement abandonnés.  Mais c’est la création d’un jardin botanique à Tours qui permit à Margueron d’acquérir une notoriété reconnue encore aujourd’hui. Reprenant l’idée d’Auguste Duvau de la Farinière qui estimait en 1828 que la ville de Tours se devait d’être, dans ce domaine, égale à Blois et Angers, il s’engage dans une aventure qui durera plus de 11 ans. Dès 1836, Margueron et la Société d’Agriculture demandent une participation de 2000 F par an à la ville et lancent une souscription auprès des tourangeaux. Le préfet d’Entraigues propose de céder une partie du jardin de la Préfecture pour installer le jardin mais le Conseil général refuse prétextant le terrain trop petit. Margueron parviendra à lever les obstacles, d’autant que la création de l’école préparatoire de médecine et de pharmacie en 1841 apporte un argument supplémentaire à la création d’un jardin : les étudiants doivent apprendre la botanique. Une superficie de 5 ha est finalement trouvée à l’ouest de la ville sur l’emplacement d’un ancien ruau, en face de l’hospice général dont Margueron est l’un des administrateurs. Le paysagiste angevin André Leroy dresse le plan du jardin et plante l’arboretum. Les végétaux proviennent des nombreux dons de divers jardins botaniques et Margueron engloutit sa fortune dans l’opération. Original de la demande de souscription auprès des tourangeaux En 1843, Margueron est nommé directeur du jardin botanique dont l’inauguration des serres et de l’orangerie a lieu le 9 novembre. Son état de santé nécessite bientôt la nomination d’un directeur-adjoint, Paul Tassin, pharmacien-chef de l’hospice de Tours. Le 15 août 1857, il reçoit du préfet Podevin, venu à son domicile, la Légion d’honneur et meurt à Tours le 1er février 1858 à l’âge de 87 ans.

(source : http://www.shp-asso.org/medias/docs/1-L060-texte-de-la-communication-L60-SHP-2013.pdf)

 

LSF